Comme Il Vous Plaira by William Shakespeare

Comme Il Vous Plaira by William Shakespeare

Auteur:William Shakespeare [Shakespeare, William]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Théâtre
Éditeur: Atramenta (www.atramenta.net)
Publié: 2011-02-14T05:00:00+00:00


SCÈNE IV

Entrent TOUCHSTONE, AUDREY et JACQUES, qui les observe et se tient à l'écart.

TOUCHSTONE.—Allons vite, chère Audrey ; je vais chercher vos chèvres, Audrey : Eh bien, Audrey, suis-je toujours votre homme ? Mes traits simples vous contentent-ils ?

AUDREY.—Vos traits, Dieu nous garde ! Quels traits ?

TOUCHSTONE.—Je suis ici avec toi et tes chèvres, comme jadis le bon Ovide, le plus capricieux des poëtes, était parmi les Goths [(retour) Barbarus his ego quia non intelligo illis ! ].

JACQUES, à part.—O science plus déplacée que Jupiter ne le serait sous un toit de chaume !

TOUCHSTONE.—Quand les vers d'un homme ne sont pas compris, et que l'esprit d'un homme n'est pas secondé par l'intelligence, enfant précoce, c'est un coup plus mortel que de voir arriver le long mémoire d'un maigre écot dans un petit cabaret : vraiment, je voudrais que les dieux t'eussent fait poétique.

AUDREY.—Je ne sais ce que c'est que poétique : cela est-il honnête dans le mot et dans la chose ? cela a-t-il quelque vérité ?

TOUCHSTONE.—Non vraiment ; car la vraie poésie est la plus remplie de fictions, et les amoureux sont adonnés à la poésie ; tout ce qu'ils jurent en poésie, on peut dire qu'ils le feignent comme amants.

AUDREY.—Comment pouvez-vous donc souhaiter que les dieux m'eussent fait poétique ?

TOUCHSTONE.—Oui vraiment, je le souhaiterais ; car tu me jures que tu es honnête. Eh bien, si tu étais poëte, je pourrais avoir quelque espoir que tu feins.

AUDREY.—Est-ce que vous voudriez que je ne fusse pas honnête ?

TOUCHSTONE.—Non vraiment, à moins que tu ne fusses laide ; car l'honnêteté accouplée avec la beauté, c'est une sauce au miel pour du sucre.

JACQUES, à part.—Quel fou encombré de science !

AUDREY.—Eh bien ! je ne suis pas jolie ; ainsi je prie les dieux de me rendre honnête.

TOUCHSTONE.—Mais vraiment, donner de l'honnêteté à une vilaine laideron, c'est mettre un bon mets dans un plat sale.

AUDREY.—Je ne suis point vilaine, quoique je remercie les dieux d'être laide.

TOUCHSTONE—Très-bien, que les dieux soient loués de ta laideur ! viendra ensuite le tour au reste. Qu'il en soit ce qu'on voudra, je veux t'épouser ; et pour cela, j'ai vu sir Olivier Mar-Text [(retour) Mar-Text, gâte-texte.], vicaire du village voisin, lequel m'a promis de se trouver dans cet endroit de la forêt, et de nous unir.

JACQUES, à part.—Je serais bien charmé de voir cette rencontre.

AUDREY.—Eh bien ! que les dieux nous donnent la joie !

TOUCHSTONE.—Ainsi soit-il ! Je fais là une entreprise capable de faire reculer un homme qui aurait le coeur timide ; car nous n'avons ici d'autre temple que le bois, d'autre assemblée que celle des bêtes à cornes.

Mais qu'est-ce que cela fait ? Courage ; si les cornes sont odieuses, elles sont nécessaires. On dit que bien des hommes ne connaissent pas l'avantage de ce qu'ils possèdent, c'est vrai.—Bien des maris en ont de bonnes et belles, et n'en connaissent pas la propriété. Eh bien ! c'est le douaire de leurs femmes ; ce n'est pas un bien qui soit des acquêts du mari.



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